Tous les réseaux sociaux ne sont pas virtuels. Certains s’appuient sur leur nature numérique pour mieux s’en extraire, et pousser leurs membres à se rencontrer dans la réalité et pour de vrai – des expressions méconnues des adeptes de Facebook. Rencontres et partages, c’est ce qu’ont voulu favoriser les créateurs du colunching, en poussant leurs adhérents à se connaître autour d’une bonne table.
Consommation collaborative
La pause déjeuner était l’un des derniers bastions de la vie privée que la consommation collaborative n’avait pas encore attaqué ; c’est désormais chose faite. Après le covoiturage (voyager en voiture à plusieurs) et le coworking (partager un espace de travail), c’est un nouveau « co » qui vient bousculer notre quotidien : le colunching.
Jean Baudrillard écrivait, dans Amérique, que la pire solitude est celle de l’homme qui mange seul. L’idée du colunching, c’est de permettre à tout un chacun de ne plus déjeuner dans son coin, en réunissant le temps d’une pause déjeuner des gens qui ne se connaissent pas. Et qui se retrouvent selon des affinités professionnelles, culturelles, culinaires ou simplement géographiques.
Les employés de moyennes et grandes entreprises, entourés de collègues du matin au soir, n’y voient peut-être pas tellement d’intérêt : eux sont toujours sûrs de croiser une tête connue dès qu’ils pénètrent dans la cantine ou dans les restos du coin. Mais quid de tous ces hommes et femmes qui travaillent seuls, depuis chez eux, ou qui n’ont pas de job et restent à la maison toute la journée ?
L’idole déjeune
Rien à voir avec les apéros géants Facebook : le colunching a pour ambition de réunir des inconnus en nombre limité, à taille humaine, entre 5 et 15 dans l’idéal, une vingtaine dans les cas particuliers. Faire connaissance, c’est possible à 10, ce ne l’est plus à 100. Et ça évite de truster des restaurants entiers avec une seule table.
À l’origine du concept : Sonia Zannad, qui travaille dans la communication en freelance ; et Frédéric de Bourguet, serial web-entrepreneur (il avait déjà à son actif les réseaux speeddating.fr, colocation.fr et soiree.fr). L’idée vient de Sonia, elle a germé en 2010. Sans collègues de travail, elle déjeune seule et a tendance à le faire n’importe comment.
Un jour, elle lance sur Facebook une invitation à ses amis : allons déjeuner ensemble ! Puis, elle se dit : pourquoi ne pas rassembler des gens qui sont dans le même cas ? freelances, télétravailleurs, auto-entrepreneurs, thésards et autres étudiants de longue durée, mais aussi mamans en congé maternité ou chômeurs.
Principes du colunching
Pour tous ceux qui passent la journée à la maison ou derrière un ordinateur, le colunching offre l’occasion de revenir à la réalité le temps d’un repas. Et de rythmer une journée de travail qui fonctionne indépendamment des collègues de bureau, des réunions et des sacro-saintes pauses café.
犀利士
tyle= »text-align: justify; »>Le principe est simple :
- On s’inscrit gratuitement
- On crée un événement ou l’on répond à une proposition existante, suivant ses affinités, sa position géographique ou ses envies gastronomiques
- On peut s’inscrire à un repas via le site Colunching.com ou via le groupe Facebook dédié
- Un nombre de personnes maximum est indiqué pour mieux gérer l’organisation, d’où l’intérêt d’annoncer sa venue
Mangez-moi, mangez-moi
Au départ, les déjeuners – exclusivement parisiens – étaient organisés par l’équipe du site et ouverts aux membres inscrits. Progressivement, ce sont les internautes qui ont pris le pouvoir et lancé eux-mêmes des invitations aux quatre coins… de la capitale d’abord, du monde ensuite. Car Colunching.com s’est étendu, jusqu’à franchir les frontières pour s’installer un peu partout.
En outre, les déjeuners entre deux tranches de travail ne sont plus les seuls événements organisés. Les colunchers invitent également leur communauté à dîner le week-end ou à boire un verre en soirée. Pas question, néanmoins, de jouer les entremetteurs : Colunching.com n’a pas l’ambition d’engendrer des histoires d’amour. Juste de sortir les gens de leur solitude alimentaire.
Voulez-vous déjeuner avec moi ?
En 2015, l’équipe a entièrement refondu le site pour en proposer une version plus ergonomique, dotée d’un tout nouveau design et agrémentée de nouvelles fonctionnalités, notamment un algorithme de matching qui prend en compte la géolocalisation et les goûts. Elle devrait aussi, prochainement, lancer une application pour iPhone et Android.
D’ailleurs, tout le monde est concerné, et pas uniquement les travailleurs indépendants, les solitaires et les casaniers. Même entouré de collègues charmants, vous pouvez en avoir assez de voir les mêmes têtes au quotidien. Le colunching permet aussi de vous aérer la tête, et de partager un repas avec des inconnus qui ne parleront pas nécessairement de la réunion du matin.
Une précision, tout de même : à la fin du repas, chacun paie sa part de l’addition. De quoi rester bons amis après le lunch, sauf si le moment du paiement commence à ressembler au sketch de Muriel Robin…