Le 11 janvier 2015, la France s’est exprimée haut et fort en faveur de la liberté d’expression et contre la violence. En réponse à ces attaques, le gouvernement a promis des mesures exemplaires et la loi renseignement a vu le jour. Alors, sommes-nous mieux protégé grâce à cette loi ? Que contient-elle exactement et quels en sont les enjeux ? Focus sur la loi renseignement.
Loi renseignement : les grandes lignes
Le mardi 5 mai 2015 a été votée la loi renseignement avec 438 voix pour et 86 contre. Taxée d’intrusive, elle a été décriée en partie parce qu’elle légalise des pratiques des services de renseignement qui étaient jusqu’à présent illégales. Une controverse sur fond de Big Brother a entouré cette loi depuis sa création alors qu’elle est présentée comme un moyen de nous protéger contre le terrorisme. Concrètement, il s’agit d’imposer aux hébergeurs et Fournisseurs d’Accès à Internet d’installer un dispositif de surveillance de leurs communications que l’on appellera « boîte noire ».
Ces dispositifs permettront de collecter des informations et des documents sur les personnes déjà identifiées comme représentant une menace. Dans le cadre de la loi, le terme « hébergeur » englobe tous les intermédiaires techniques qui mettent à disposition des tiers des outils permettant de communiquer des informations en ligne. C’est-à-dire que cela comprend des éditeurs (internautes) qui partagent des espaces de publication dit participatifs comme des forums, des réseaux sociaux ou des espaces de commentaires.
Voici une explication en images avec les patates de Martin Vidberg. Pour en savoir plus retrouvez la page du Monde.
Les enjeux de cette loi
Auparavant la justice pouvait demander les données de connexion d’un utilisateur (adresse IP et horodatage) sur simple réquisition judiciaire afin d’obtenir une identification. Mais seulement si l’internaute avait utilisé un espace de publication hébergé en France dans le cadre d’échanges entre individus. Dans l’urgence, cela se pratiquait parfois sans réquisition et donc hors du cadre de la loi. Si désormais les boîtes noires sont mises en lumière, l’effet risque d’être tout bonnement dissuasif.
En effet, la loi va tout simplement encourager les personnes qui représentent une menace à utiliser des moyens de communication similaires proposés par des pays qui n’utilisent pas ce système ou à se protéger en couvrant leurs traces. Cela va donc compliquer le travail des services de renseignement au lieu de le simplifier. En effet, ces individus vont soit fuir le réseau français soit se former à des pratiques de codages plus pointues pour mieux se dissimuler. Pour en savoir plus, consultez le Journal du Net.
L’amendement pour l’activité d’hébergement
La loi est toutefois à nuancer car les hébergeurs ont demandé un amendement pour l’activité d’hébergement. Il réduit le champ d’action des écoutes hors cadre juridique permises par la loi :
- Tout d’abord cela ne s’appliquera qu’en cas de lutte antiterroriste donc pas de dérives pour espionner l’activisme politique par exemple.
- Les écoutes ciblées et précises (à un IP ou un e-mail) se feront dans le cadre d’une enquête judiciaire et seront limitées à 4 mois renouvelables.
- Les écoutes visent les métadonnées, autrement dit l’auteur des communications et non la communication en elle-même, liste d’IP ou d’adresse e-mails par exemple.
- C’est l’hébergeur lui-même qui procède à la récupération des métadonnées et non une personne extérieure.
- Ces demandes doivent passer par une commission de contrôle et ne peuvent plus relever du cadre de l’urgence, tout est traçable sous forme de procédures écrites strictes.
Pour en savoir plus, lisez l’article « Le point de vue d’OVH.com sur la loi renseignement ». Plus largement, cette loi engendre un climat de peur et de stress pouvant déboucher sur de l’autocensure par crainte d’être écouté. 63 % des Français estiment que cette loi n’entrave pas nos libertés puisqu’elle ne sanctionne que ceux qui ont quelque chose à se reprocher. En revanche, une autre partie de la population crie son indignation face à la légalisation des écoutes massives. Même si elle est restreinte pour les hébergeurs, les FAI sont toujours soumis à la loi. Quoi qu’il en soit, la loi renseignement traduit un sentiment de traumatisme suite à l’attaque qui a visé Charlie Hebdo en janvier 2015.